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Immobilier locatif : top ou flop du dispositif Denormandie ?

Immobilier locatif : top ou flop du dispositif Denormandie ?

Trois ans après sa création, le disposotif Denormandie peine à trouver sa place sur le marché de la défiscalisation immobilière. Il s’agit pourtant d’un mécanisme intéressant pour les particuliers qui achètent un bien à rénover pour le louer ensuite, mais dans le cadre de conditions particulières. Selon des estimations des pouvoirs publics, seulement 245 ménages bénéficieraient de ce dispositif qui permet de réduire son impôt sur le revenu, et dont la finalité est de développer l’offre locative aux ménages modestes dans des territoires spécifiques, mais aussi de rénover, notamment en matière énergétique, des biens anciens et souvent délabrés.

Denormandie : un dispositif de défiscalisation immobilière locative

Le dispositif Denormandie, lancé le 1er janvier 2019, tient son nom de son initiateur, Julien Denormandie, alors ministre de la Ville et du Logement. Il s’agit d’un mécanisme de défiscalisation immobilière qui se présente comme une extension d’un dispositif plus ancien, le « Pinel ». Il a été mis en place dans le but d’accélérer la rénovation des logements dégradés ou inoccupés dans les villes moyennes afin de les remettre sur le marché de la location.

Ouvert aux particuliers qui font l’acquisition jusqu’au 31 décembre 2023 d’un logement ancien qu’ils rénovent et qu’ils louent, le dispositif Denormandie leur permet de bénéficier d’une réduction sur leur impôt sur le revenu : - 12 % pour un logement loué pendant 6 ans, - 18 % pour 9 ans, et - 21 % pour une durée de location de 12 ans.

Pour prétendre à cet avantage fiscal, le logement doit remplir certaines caractéristiques. Il doit d’abord être situé seulement dans certaines communes, celles dont les besoins en réhabilitation de l’habitat est important. La liste de ces communes est définie dans une annexe d’un arrêté du 26 mars 2019.

Le logement doit également être situé dans des communes qui ont signé une convention d’opération de revitalisation de territoire (ORT), dispositif qui a pour objectif de faciliter la rénovation du parc de logements, entre autres, dans les centres-villes, dont notamment le programme appelé « Action cœur de ville » qui vise à améliorer les conditions de vie des habitants des villes moyennes.

Le logement doit aussi faire l’objet de travaux de réhabilitation dont le montant représente 25 % de la valeur du bien acheté, dans la limite de 300 000 euros. Ces travaux concernent la création ou l’aménagement de surfaces habitables nouvelles, l’assainissement du logement, et des travaux de rénovation énergétiques.

D’autres part, les propriétaires qui souhaitent bénéficier des avantages fiscaux du dispositif Denormandie doivent s’engager à mettre en location leur logement rénové pour une durée de 6,9 ou 12 ans à destination de ménages modestes qui ne dépassent pas un certain plafond de ressources. De plus le loyer appliqué est plafonné.

Quel bilan du dispositif Denormandie trois ans après sa création ?

Sur le papier, le dispositif Denormandie est intéressant compte tenu du montant des réductions fiscales dont peuvent bénéficier les propriétaires qui achètent un bien pour le rénover et pour le louer à des ménages modestes.

Pour autant, le bilan du dispositif Denormandie, qu’il est possible de faire en 2022, est en demi-teinte. Par rapport au dispositif Pinel qui octroie une réduction d’impôt aux particuliers qui investissent dans un logement situé dans un bâtiment d’habitation collectif pour le mettre en location, et qui rencontre un fort succès, le dispositif Denormandie, qui est l’extension du Pinel pour les bâtiments anciens, peine à trouver sa place.

Une annexe au projet de loi de finances pour 2022 appelée « Évaluation des voies et moyens. Tome 11, les dépenses fiscales », publiée par le ministère de l’Économie, apporte quelques précisions chiffrées sur la portée du dispositif Denormandie, sous la forme d’une simulation.

Si l’on prend en compte les effets estimés du dispositif Denormandie depuis sa création et les prévisions pour 2022, seulement 245 ménages auront bénéficié de ce mécanisme de défiscalisation immobilière locative. Un nombre de bénéficiaires donc bas par rapport aux objectifs attendus par les initiateurs de ce dispositif.

Pour preuve, cette dépense fiscale pour l’État, aussi appelée « niche fiscale », s’est montée à 1 million d’euros en 2021, et coûtera, selon les estimations, 2 millions d’euros en 2022. Un coût bien en dessous de ce qu’avaient prévu les pouvoirs publics : 15 millions d’euros en 2021 et 6 millions d’euros en 2022. Preuve que le dispositif Denormandie n’a pas réussi jusqu’à maintenant à remplir son objectif premier de réhabilitation du patrimoine immobilier dégradé, notamment en matière de travaux de rénovation énergétique, et de développer une offre plus importante de logements locatifs à l’attention des ménages modestes.

En comparaison, le dispositif Pinel qui octroie également des réductions d’impôt sur le revenu (le mécanisme qui a inspiré le dispositif Denormandie), toujours selon des simulations, va concerner 2 578 ménages en 2021 et 2022 (257 000 ménages depuis sa création en 2012) pour un coût pour l’État de 1,19 milliard d’euros en 2021 et 1,38 milliard d’euros en 2022.

Un bilan donc en demi-teinte pour le dispositif Denormandie qui peut s’expliquer pour plusieurs raisons. D’abord, la durée de location à laquelle les bénéficiaires doivent se soumettre (6,9 ou 12 ans) peut apparaître comme un frein. D’autre part, les risques locatifs sont réels pour ces investisseurs qui doivent destinés leurs biens à des ménages modestes, dont les ressources sont donc faibles, avec en conséquence les éventuelles menaces de devoir faire face à des impayés de loyer.

Pourtant, selon des données calculées en 2020 par le leader de l’estimation en ligne des prix immobilier, le seuil de rentabilité nette (qui prend en compte l’ensemble des charges liées à l’achat, à la détention du bien et l’avantage fiscal) pour les propriétaires qui décident d’avoir recours au dispositif Denormandie est en moyenne de 3,7 % (avec une possibilité d’atteindre 4,9 % dans certaines villes), contre 2,2 % s’ils louaient de manière classique leur bien.

Autre raison qui peut expliquer le bilan mitigé du dispositif Denormandie : les réductions d’impôt sur le revenu s’appliquent seulement si le logement réhabilité et loué se situe dans des communes qui répondent à certains critères comme nous l’avons vu dans le descriptif de ce mécanisme. De ce fait, seulement un peu plus de 300 villes sont éligibles à ce dispositif aujourd’hui.

Et parmi elles, certaines n’ont pas le profil pour assurer au bailleur de réaliser une bonne affaire au moment où ils revendra son bien immobilier. De plus, certaines de ces communes présentent un taux de vacance locative important, qui ne garantit donc pas aux bailleurs de pouvoir à coup sûr trouver des locataires pour leur bien.

En résumé, les particuliers ont tout intérêt à bien connaître les caractéristiques des villes où ils souhaitent réaliser un investissement immobilier locatif et ainsi pouvoir bénéficier du dispositif Denormandie.

Par Valérie Schneider - Publié le 28/09/2022

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